Covid-19 : l’Académie de médecine « fermement » opposée à la réintégration des soignants non-vaccinés
Alors que la réintégration des personnels de santé non suspendus depuis septembre 2021 se pose dans les débats parlementaires, la société savante médicale a exprimé une opposition ferme envers cette éventualité. Au Sénat, le débat sur l’amendement de Philippe Bas sur les soignants non vaccinés ne fait pas non plus l’unanimité et s’annonce mouvementé.

Covid-19 : l’Académie de médecine « fermement » opposée à la réintégration des soignants non-vaccinés

Alors que la réintégration des personnels de santé non suspendus depuis septembre 2021 se pose dans les débats parlementaires, la société savante médicale a exprimé une opposition ferme envers cette éventualité. Au Sénat, le débat sur l’amendement de Philippe Bas sur les soignants non vaccinés ne fait pas non plus l’unanimité et s’annonce mouvementé.
Guillaume Jacquot

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En plein examen au Sénat du projet de loi de veille et sécurité sanitaire contre le covid-19, l’Académie de médecine n’est pas restée silencieuse alors que resurgit dans les débats la question des soignants suspendus non-vaccinés contre le virus. Dans un amendement adopté ce 19 juillet, la commission des lois du Sénat a introduit un nouvel article au projet de loi, pour définir les conditions de suspension de l’obligation vaccinale prévue pour les soignants dans la loi du 5 août 2021. Il reviendra à la Haute Autorité de santé de juger si la situation sanitaire ou les connaissances scientifiques ne justifient plus cette obligation. La HAS pourra s’autosaisir ou alors être sollicitée par le ministère de la santé, les commissions parlementaires des affaires sociales ou encore le Comité de contrôle et de liaison covid-19. Charge ensuite au gouvernement d’agir par décret.

La réaction de l’Académie de médecine ne s’est pas fait attendre, alors que déjà, lors des débats à l’Assemblée nationale, des députés LR, RN ou LFI ont tenté de défendre la réintégration des soignants. Exprimant sa « ferme opposition » à l’éventualité d’une réintégration, la société savante estime qu’un tel geste « serait une faute ». Dans son communiqué, elle affirme qu’un refus de vaccination, « motivé par des convictions personnelles est respectable, mais incompatible avec le métier de soignant ». Et d’ajouter que le retour des soignants non-vaccinés « compromettrait le climat de confiance et la cohésion qui doivent exister entre ses membres et avec les malades ».

« Le rapporteur a choisi de flatter les antivax », reproche Bernard Jomier

La version du texte de Philippe Bas, qui sera soumise au vote du Sénat ce 20 juillet, n’a pas que des alliés. Le médecin Bernard Jomier (apparenté au groupe socialiste), ancien rapporteur d’une commission d’enquête sur le covid-19, ne décolère pas. « Le rapporteur a choisi de flatter les antivax pour des raisons internes au groupe LR. Ça ne répond pas à la lutte contre la pandémie. Ce message-là participe à compromettre la politique de vaccination. La cuisine opérée sur ce texte, ce n’est pas la meilleure manière de démarrer cette législature », réagit auprès de Public Sénat le sénateur de Paris, qui n’y voit qu’une « posture politique ». « Son texte ne réintègre personne mais pose le sujet. Cela signifie qu’il veut dire que c’est un sujet important. »

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Chez les partisans favorables à l’abrogation de l’abrogation vaccinale, de sérieux doutes sont aussi émis sur le caractère opérant de l’article. « Il me convient car il va dans le bon sens. Ce sujet est aujourd’hui au cœur de nos débats », reconnaît la sénatrice LR Sylviane Noël. « Mais je le trouve beaucoup trop timoré. On y met de telles conditions que même s’il est voté, ce sera toujours entre les mains du gouvernement. Les soignants et les pompiers doivent être réintégrés immédiatement, sans discussions », plaide la sénatrice de Haute-Savoie. En juin, elle a déposé une proposition de loi avec le même objectif, elle a été cosignée par quinze autres sénateurs de droite et du centre.

Lors de son audition au Sénat, le ministre de la Santé François Braun a affirmé que les soignants suspendus représentaient « 0,4 % de l’ensemble des professionnels de santé ». C’est déjà de trop, estime Sylviane Noël, qui souligne que le « système de santé est tellement affaibli en ce moment ». La sénatrice considère affirme d’ailleurs que le chiffre est sous-estimé par le nombre démissions, sans compter qu’il ne prend pas en compte les libéraux, frappés d’interdiction d’exercer. « J’ai sollicité le président du Sénat pour qu’il puisse interroger les ARS. Il m’a promis qu’il allait le faire », indique-t-elle.

Sylviane Noël en appelle à Gérard Larcher pour connaître le nombre de soignants libéraux interdits d’exercer

Comme en octobre 2021, lorsqu’a été débattue une proposition de loi du groupe socialiste sur l’obligation vaccinale contre le covid-19 en population générale, le débat risque d’être animé. Bernard Jomier rappelle que cette disposition concernant les soignants est « quelque chose de consubstantiel à la profession, avec les vaccinations obligatoires ». « Je comprends parfaitement la réaction de l’Académie de médecine, avec des arguments fondés », approuve-t-il. Sylviane Noël considère pour sa part que cette communication « touche le fond ». « De quel climat de confiance parle-t-on ? De celui dans lequel on fait travailler des soignants vaccinés et positifs ? »

De son côté, le gouvernement par la voix du ministre François Braun compte saisir la Haute autorité de santé (HAS) et le Conseil Consultatif National d’éthique sur cette question particulière. Ce qui, à ce stade, ne plaide pas pour une intégration de cette disposition dans le texte.

Quitte à sortir du périmètre initial du projet de loi, le sénateur Bernard Jomier aurait préféré voir une disposition sur l’aération des lieux clos, sur laquelle Emmanuel Macron s’est engagé. Au lieu de cela, Philippe Bas « choisit de porter un microsujet, qui est un reniement de ses positions antérieures », dénonce-t-il.

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