Budget de la Sécurité sociale : le Conseil constitutionnel censure la « taxe lapin »
Credit:SYSPEO/SIPA/2412131249

Budget de la Sécurité sociale : le Conseil constitutionnel censure la « taxe lapin »

Les Sages ont rendu leur décision sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Deux articles sont censurés sur le fond, et 12 autres sont également jugés non conformes à la Constitution, car ils ne relevaient pas du champ d’une loi de financement. L’article 52, qui prévoyait une pénalité pour les patients qui n’honorent pas leurs rendez-vous médicaux, est retoqué.
Guillaume Jacquot

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

C’est le point final d’une longue séquence budgétaire. Après le budget de l’État, c’est au tour du budget de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 de franchir le filtre du Conseil constitutionnel, saisi par le groupe La France insoumise. L’essentiel du projet a été validé, dans une décision rendue ce 28 février, et va donc pouvoir être promulgué prochainement au Journal officiel. Quatorze articles sont néanmoins censurés, deux sur le fond, et douze sur la forme. Ces derniers étaient considérés comme des « cavaliers législatifs », c’est-à-dire qu’ils n’auraient pas dû figurer dans une loi de financement (ce sont les articles 34, 36, 42, 44, 49, 50, 53, 58, 60, 74, 84 et 94).

Un article emblématique de ce PLFSS ne figurera pas dans la loi qui sera promulguée : l’article 52. Ce dernier prévoyait la mise en place d’une pénalité à la charge des patients qui n’honorent pas un rendez-vous médical, sans en avertir un médecin ou l’établissement, ou sans respecter un délai raisonnable. C’est la fameuse taxe lapin, introduite à l’initiative du Sénat, et soutenue par le gouvernement.

La taxe lapin, en l’absence de modalités précises, est jugée contraire à la Constitution

Le Conseil constitutionnel reproche notamment aux parlementaires de ne pas avoir défini la nature de la pénalité, de ne pas avoir encadré son montant, « ainsi que les conditions de sa mise en œuvre ». Les modalités devaient faire l’objet d’un texte réglementaire, et la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin, avait expliqué aux sénateurs vouloir « aboutir rapidement sur ce dossier ».

Le Conseil constitutionnel estime qu’en l’absence de toutes ces garanties, les législateurs ont « privé de garanties légales les exigences constitutionnelles découlant du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ». Selon les termes de ce dernier : la Nation « garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence.

Les Sages ont également censuré l’article 51, qui prévoyait de réformer l’organisation du service du contrôle médical de l’Assurance maladie. Il devait permettre le transfert, aux caisses primaires d’assurance maladie et aux caisses générales de sécurité sociale, des contrats de travail des personnels administratifs et des praticiens-conseils du service du contrôle médical, relevant de la caisse nationale d’assurance maladie. Le Conseil a estimé que ces dispositions n’avaient pas leur place dans une loi de financement de la Sécurité sociale.

Deux réserves d’interprétation

S’agissant de l’article 48, relatif à l’accompagnement à la pertinence des prescriptions, le Conseil constitutionnel valide l’article, tout en l’assortissant de deux réserves d’interprétation. Selon cet article, certains soins ne pourront être remboursés au patient que si le prescripteur a consulté au préalable le dossier médical partagé ou vérifié que sa prescription respecte les indications ouvrant droit au remboursement. Le patient devra présenter un document, établi par le prescripteur, attestant de la bonne vérification de ces principes.

Le Conseil constitutionnel rappelle notamment qu’il « reviendra au prescripteur d’informer préalablement le patient de l’absence de prise en charge de ces soins s’il ne présente pas un tel document au professionnel appelé à exécuter la prescription ».

Partager cet article

Dans la même thématique

SIPA_01213701_000016
4min

Santé

Nestlé Waters devant la justice : l’UFC-Que Choisir réclame le retrait temporaire des bouteilles de Perrier à la vente

Ce mercredi matin, au tribunal judiciaire de Nanterre, l’association de consommateurs UFC-Que Choisir a demandé le retrait provisoire des bouteilles Perrier. Elle estime que leur commercialisation sous l’appellation « eau minérale naturelle » constitue une tromperie. Face au « scandale des eaux en bouteille », le Sénat avait lancé en décembre 2024 une commission d’enquête.

Le

Budget de la Sécurité sociale : la boîte à outils du Sénat pour assurer un retour à l’équilibre entre 2029 et 2035
9min

Santé

Budget de la Sécurité sociale : la boîte à outils du Sénat pour assurer un retour à l’équilibre entre 2029 et 2035

Dans le cadre d’un rapport d’évaluation et de contrôle, une sénatrice centriste et une sénatrice écologiste sont parvenues à des « points d’accord » sur la nécessité de ramener la Sécurité sociale à l’équilibre et de faire évoluer certains outils de gouvernance. Selon leur projection, même avec une stabilisation des dépenses de santé, le déficit de la Sécurité sociale pourrait atteindre 3 points de PIB en 2070. Elles n’ont toutefois pas pris parti sur la longue liste de mesures d’économies ou de recettes, annexée au rapport.

Le

DC: President Donald Trump discusses autism at the White House
4min

Santé

Paracétamol, vaccins, autisme : « Les propos de Donald Trump ne reposent pas sur la science »

« N'en prenez pas » et « n'en donnez pas à votre bébé ». Ce lundi, alors que l’administration Trump avait promis en début d'année de révéler les causes de ce qu'elle qualifie d'"épidémie d'autisme" aux Etats-Unis, le président américain a livré son diagnostic. Il a fortement déconseillé le paracétamol aux femmes enceintes, l'associant à un risque d'autisme élevé pour les enfants, avant de jeter le discrédit sur les vaccins. Pour Public Sénat, le professeur Benoit Marin, responsable du Centre de Référence sur les Agents Teratogènes (Crat), fait le point sur ce que dit vraiment la science.

Le